L'amour est une bataille éternelle...

Lune du Printemps de l'Espoir,
16ème jour, crépuscule
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La brise lui apporta le doux fumet d'un mulot, elle se rendit compte qu'elle était affamée.
Suivant la piste encore fraiche, elle atteignit la lisière de la forêt. Réticente à s'aventurer à découvert, Lune interrompit la traque.
Le petit animal, lui, poursuivit sa route, imperturbable. Il ne s'était pas encore aperçu qu'il pouvait devenir la proie de n'importe quel rapace nocturne, bien qu'en ce lieu ils soient très peu.
Amusée par son indifférence, la jeune chatte continua à l'observer, toujours dissimulée dans les sombres feuillages. Elle se rendit soudain compte de l'endroit où elle se trouvait: la Falaise Lunatique. On la dit très dangeureuse la nuit...
En effet, la mer semblait déchaînée contre les parois rocheuses et de violentes bourrasques balayaient continuellement son sommet. Son regard se reporta sur le mulot. Intriguée, toute trace de faim envolée, elle le vit se pencher vers le bord du précipice. Puis il disparut. Lune se redressa d'un bond, sans pour autant sortir de sa cachette.
Etait-il tombé, poussé par le vent ?
Ou bien s'était-il délibérément jeté dans le vide?
Cette seconde hypothèse semblait totalement absurde. Comment cette créature pouvait-elle désirer la mort ? 

« Peut-être était-elle comme moi, perdue et sans repères...
Une si petite et insignifiante créature dans ce monde. Peut-être que la mort est la plus sage des alternatives... »

Un rayon de lune argenté vint éclairer le bout de la falaise, l'interrompant dans ses sombres réflexions. Intrépide et curieuse par nature, la jeune chatte commença à se rapprocher du bord. Aplatie au sol pour lutter contre les vents violents, les oreilles en arrière pour résister à l'assourdissant bruit des vagues.
Arrivée à l'extrémité de la falaise, elle se campa de toutes ses forces et put enfin voir la mer. Immense forme sombre, illuminée des reflets de la lune, se mouvant en tous sens. L'écume, blanche et immaculée, venait se fracasser contre les rochers en une myriade d'étincelles. Les eaux noires ne semblaient pas avoir de fond, continuant à s'enfoncer ainsi de plus en plus profondément dans le cœur de la terre.
Ce paysage chaotique se profilait partout à l'horizon. Où qu'elle pose les yeux, le même spectacle l'attendait. Tellement beau, mais terrifiant. Une vision de mort d'où on ne peut détacher le regard. Hypnotisée par le tourbillon des vagues, Lune se pencha en avant, de plus en plus. Une violente bourrasque manqua de la faire basculer, lui faisant reprendre ses esprits. Elle voulut reculer, mais son corps ne lui obéissait pas.
Tâchant de garder son calme, elle fit ralentir les battements de son cœur. Elle tourna la tête et sa vision fut une nouvelle fois confrontée à la fureur de la mer. Elle sentit ses muscles lâcher prise sous la puissance des rafales de vent, et peut-être un peu par sa volonté, elle ne savait plus. Lentement, comme si le temps avait ralenti, elle sentit le sol se dérober sous ses pattes. Et elle commença inexorablement à tomber. Etrangement, elle n'avait pas peur. Lune était en train de filer droit vers la mort, qui à cet instant prenait la forme d'une mer déchaînée, et elle n'éprouvait aucune peur. Une pensée s'insinua dans son esprit.

« Est-ce que je veux mourir? »

Une partie d'elle même se révolta à cette idée. Certes, sa vie avait été, était, et serait bien difficile. Mais elle n'y renoncerait pas sans se battre! Furieuse, elle balança sa patte le plus haut possible. Celle-ci heurta un rocher et s'y agrippa avec détermination. Les voix dans sa tête hurlèrent de concert, comme pour la supplier de ne pas abandonner. Elle pensa alors au mulot, lui était-il arrivé la même chose? Avait-il survécu? Certainement pas, les chances de survie en cas de chute étaient terriblement minces. S'obligeant à l'oublier, pleine d'un courage nouveau, Lune poussa un hurlement de rage ou se glissait une pointe de détresse.
Elle se rendit tout de même compte que sa vie ne tenait qu'à une griffe...

Réveillé à cause du hululement d'une chouette, Museau de Pluie se glissa hors de sa tanière, zigzaguant entre les corps endormis de ses camarades. En sortant de la clairière principale, il commença à traquer un campagnol, si rare la nuit. Malgré la journée chargée qu'il avait eu, il n'était pas fatigué, loin de là. Il avait presque retrouvé sa jeunesse. Il ronronna à cette pensée et continua sa traque. Le campagnol le mena jusqu'à la mer. Cette nuit là, elle était particulièrement déchaînée et le vent soufflait à en faire frissonner un ours. Lui même frissonna à cet instant. Il décida de monter sur la falaise pour voir la mer d'en haut. Il adorait la mer. Depuis qu'il était apprenti. Il y allait souvent en cachette la nuit étant apprenti, mais avais perdu cette habitude après son baptême de guerrier. Trop de responsabilités... En montant sur la falaise, il découvrit une magnifique chatte noire penchée vers la mer. Essayant de l'approcher en silence, il réussit à se cacher dans un buisson, à deux queues de renard d'elle. Il pouvait sentir son odeur... c'était une rebelle, mais qu'importe. Il allait s' approcher encore quand... Elle sauta de la falaise ! Il courut vers le bord et regarda dans le vide, espérant qu'elle ait survécu. Miracle ! Sa patte accrochée à une pierre la maintenait, mais pour combien de temps ? Enfonçant fermement ses griffes dans la terre, il prit par la nuque la chatte noire et la remonta sur la terre ferme avant de la jeter dans les buissons. Il s'y glissa à son tour et lui dit:

- Ça t'arrive souvent de sauter d'une falaise ?

Des larmes de rage lui brouillaient la vue. Incapable de se hisser sur la terre ferme, Lune Oubliée resta accrochée au rocher, coûte que coûte. Transie de froid, elle sentit ses membres se raidir.
Finalement allait-elle mourir ici? Seule...
Désespérée, la patte ensanglantée, coupée sur le rocher, elle hurla encore une fois toute sa rage. Mais son cri se perdit dans la fureur des éléments.
Elle était sur le point de lâcher prise, lorsqu'un museau apparut au-dessus d'elle, un grand chat écaille de tortue qui la prit fermement par la nuque, avant de la remonter.
Il la jeta ensuite dans les buissons les plus proches, pour l'abriter certainement.
La jeune chatte tremblait, le vent et l'eau avaient eu raison de sa fourrure noire. Elle sentait à peine la douleur à sa patte. Elle était sur le point de se laisser aller lorsqu'elle se rendit compte que son sauveur l'avait rejoint. D'après son odeur, un chat du Clan du Torrent Etoilé. Pourquoi l'avait-il sauvé ?

-Ça t'arrive souvent de sauter d'une falaise ?

Lune, intriguée, se demanda les raisons qui l'avaient poussé à agir. Mais ce chat ne lui faisait pas peur, il avait beau être beaucoup plus fort qu'elle, pourquoi l'aurait-il sauvée pour ensuite la tuer ?
Et s'il la ramenait à son clan? Quel sort celui-ci lui réserverait il ?
Inquiète, elle garda la tête baissée.

-Je... Je suis tombée.

Bien, sa voix tremblait et elle aussi.
Prenant son courage à deux pattes, elle releva la tête et planta son regard dans celui de ce chat.

Le regard bleu glacé de ce chat était... Magnifique.
Alors qu'elle s'attendait à y lire de la haine ou du dédain, comme de nombreux chats faisant partie des clans, dans le sien elle ne lut que soulagement et, lui sembla t-il, une pointe de tendresse.
Lune soutint son regard avec peine. Remarquant son trouble, il détourna le regard.
Elle se rendit compte qu'ils étaient couchés côte à côte. Son mouvement de recul fut purement instinctif.
Sans se départir de son calme, il engagea la conversation :

-Je suis Museau de Pluie, du Clan du Torrent Etoilé. J'ai bien cru que tu allais tomber ! Tu m'as fait peur tu sais ? Mais je ne sais pas qui tu es, même si je sais que tu ne fais partie d'aucun Clan...

Il se coucha ensuite sur le ventre, attendant sans doute sa réponse. Lune Oubliée tenta de s'asseoir, mais prenant appui sur sa patte blessée, elle s'écroula.
Honteuse de se montrer si faible, la jeune chatte montra les crocs, lui faisant bien comprendre qu'elle pouvait se débrouiller seule.
Une fois redressée elle put enfin lui répondre :

-Je suis Lune Oubliée. C'est tout ce que tu as besoin de savoir. Je te suis reconnaissante de m'avoir sauvé, mais nos chemins se séparent ici.

Sur ce, elle commença à marcher. Mais au bout de quelques pas, la douleur à sa patte devint insupportable.
Baissant les yeux, elle y vit une profonde entaille rougeâtre, d'où s'échappait un flot de sang.
Elle fit encore trois pas avant de s'écrouler, inconsciente...

La chatte essaya de s'asseoir mais sa patte entaillée l’empêcha de trouver la position et elle s'écroula. Il allait l'aider mais elle se releva tant bien que mal et lui montra ses crocs, signe qu'elle ne voulait aucune aide. Museau de Pluie fût piqué au vif face à la dureté de la chatte: il ne lui avait montré que du respect jusqu'à maintenant. Que lui reprochait-elle ?

-Je suis Lune Oubliée. C'est tout ce que tu as besoin de savoir. Je te suis reconnaissante de m'avoir sauvé, mais nos chemins se séparent ici.

Ses mots eurent l'effet d'une flèche en plein cœur, il ne savait pas comment l'expliquer mais un sentiment l'attirait vers cette chatte comme un aimant. De l' Amour ? Possible... Elle se leva et partit cahin-caha mais, après quelques pas, elle s'écroula. Il courut auprès d'elle, elle avait perdu connaissance. Il se pencha vers elle pour lui murmurer à l'oreille:

-Je t'aime...

Certain qu'elle n'avait rien entendu, il la porta en la mettant sur son dos et l'emmena près de la mer, si près qu'il put prendre un peu d'eau du bout de la patte avant de jeter le liquide salé sur la chatte. Peu après, elle se réveilla. Content qu'elle ne soit pas gravement blessée, il l'amena sous le couvert des arbres et examina sa patte. Il chercha ensuite de quoi la soigner. Il trouva vite des toiles d'araignées et referma la plaie avant d'enrouler sa patte dans son remède. C'était tout ce qu'il pouvait faire, il n'était pas guérisseur mais il était presque sûr que ça suffirait à empêcher les saignements. Il lui lécha ensuite les oreilles, espérant qu'elle se réveille complètement. Quand celle-ci le regarda avec un regard furieux, il lui dit:

- Tu es sûre que tu ne veux pas que je t'aide ?

Il lui fît ensuite le plus beau sourire du monde. Inspirant le sarcasme et l'amour passionné qu'il avait pour elle.

Tout autour d'elle était noir, sans consistance. Le néant le plus total.
Jusqu'au moment ou elle entendit une voix. Pas celles habituelles, une autre, venant de loin...

-Je t'aime...

Ce mot, chuchoté avec une infinie douceur, était porteur d'espoir.
Il amena la lumière dans le chaos. Sortant Lune de l'inconscience. Elle s'accrocha à cette lumière afin de revenir dans la réalité, quittant ce sombre univers.

Encore trop faible pour ouvrir les yeux elle se laissa aller, comptant sur l'honnêteté de Museau de Pluie, en effet, elle était à sa merci...
Mais jamais il ne lui ferait de mal, elle le sentait...
Après l'avoir installée sous les arbres et soigné sa blessure, il lui lécha tendrement les oreilles.
Un sentiment inconnu la submergea alors. Son cœur, brisé par les épreuves de la vie, lui semblait à nouveau...entier.
Elle était furieuse, contre elle même, pour ne pas s'en être rendu compte avant.

- Tu es sûre que tu ne veux pas que je t'aide ?

Elle rit. Un rire simple, qui venait de loin, le premier depuis bien des lunes...
Il lui sourit passionnément, comprenant l'erreur.
Bien sûr qu'elle voulait de son aide!
Elle voulait ne plus jamais le quitter, de peur que son cœur ne se brise à nouveau.
Elle avait perdu trop d’êtres chers. Et elle était prête à se battre pour lui, pour leur amour!

-Moi aussi... Je t'aime.

Pas besoin de dire plus. Lune lui effleura tendrement le museau. Elle avait enfin trouvé un chat qui puisse l'aimer autant qu'elle le pourrait.
Toute les autres questions qui la hantaient à longueur de temps, les voix, son passé... Tout lui était égal! Seul comptait l'instant présent.
Et le futur qu'il construiraient ensemble.
Elle se sentit libérée de tout, heureuse tout simplement.

Elle ria. Le plus beau rire du monde pour lui. Il l'aimait, et c'était tout ce qui comptait pour lui. Il voulait juste être auprès de sa bien-aimée. Il ne voulait plus jamais la quitter.

-Moi aussi... Je t'aime.

Juste ce qu'il voulait entendre, juste ce qu'il voulait savoir. Mais, il ne voulait pas laisser tomber le Clan, que dirait Etoile de Neige si elle l'apprenait ? Elle le virerait sûrement du Clan... Non, il ne pouvait pas laisser tomber son Clan alors qu'il était en pleine famine. Et les Hunger Games, si il y était envoyé ? Cette relation était impossible, sans aucune issue mais qu'importe. Tout ce qu'il voulait, c'était rester avec elle, pour toute la vie. Elle illuminait la vie fade qu'il menait jusqu'à maintenant. Il lécha tendrement sa bien-aimée entre les deux oreilles et enfonça son museau dans son pelage pour sentir son parfum. Un parfum de liberté, de champs, de prés, de forêts... Lune avait dû en baver avant cet instant. Il lui ferait oublier ces mois de dures épreuves, il la rendrait heureuse quoi qu'il en coûte. Ils seraient ensemble, tout simplement.

RP Clos !!